La Charte des valeurs du PQ est raciste et néocoloniale

La dichotomie laicité et religion est basée sur une idéologie raciste. Elle présuppose une perception du monde neutre, objective, rationnelle, en contraste avec une longue série de visions du monde biaisées, subjectives et irrationnelles : les religions. Ce n'est pas une coincidence si les systèmes de pensées et les habitudes de vie qui dominent parmi les européens de l'ouest et leurs descendants (physiques ou idéologiques), c.à.d. les occidentaux, sont présentées comme étant neutres, contrairement aux idées et aux habitudes des autres peuples. Un costard cravate, une jupe, une blouse, un soulier de type occidental sont considérés neutres, comme si ces vêtements n'étaient pas le produit de forces socio-culturelles et historiques particulières. Lorsque portés par une personne en position d'autorité, comme un employé du gouvernement, il ne seront pas considérés comme imposant une vision du monde aux interlocuteurs de cette personne.

Les nationalistes québécois du siècle dernier défendaient leur langue et leur culture contre un groupe culturel plus puissant, les anglophones, et ils contestaient le pouvoir écrasant d'une institution religieuse, l'église cathollique, sur la société. Combattre l'hégémonie des Anglais et de l'Église était alors une prise de position favorisant l'émancipation de personnes dominées en rapport à leurs oppresseurs. Lorsque cette même logique est appliquée aujourd'hui à l'égard de personnes de groupes culturels et religieux minoritaires et largement marginalisés, comme par exemple les femmes musulmanes au Québec, elle devient instrument de domination et de persécution plutôt que de libération et d'émancipation.

Les européens de l'ouest et leurs descendants sont héritiers d'un système colonial (impérial, néocolonial, etc.) vieux de cinq siècles, qui les place au sommet de l'ordre mondial actuel. Les groupes qui épousent des modes de pensée et des pratiques qui se sont principalement développées à l'extérieur de l'occident sont dominés politiquement, économiquement, socialement et culturellement par les représentants d'idéologies eurocentriques intégristes comme le Parti Québécois contemporain. Soyons clairs, plusieurs musulmans au Québec sont tout à fait conscients que les Français qui ont quitté leur patrie initiale pour coloniser l'Amérique avaient des motivations, des idéologies et des modes d'action plutôt semblables à ceux qui ont colonisé des pays à majorité musulmane comme ceux du Maghreb. Bien que le Québec n'ait jamais colonisé l'Afrique du Nord, la majorité au Québec fait appel à un héritage lorsqu'elle veut imposer à une femme québécoise d'origine Marocaine, par exemple, de ne pas

couvrir ses cheveux d'un foulard en travaillant pour l'état. Elle devient une indigène et ses oppresseurs des colons. Le fait que certaines autres québécoises d'origine marocaine puissent être en faveur de cette interdiction et que certains québécois d'origine française soit contre, ne change rien à ce constat. Les individus sont plus complexes que les courants historiques majeurs. Il y a toujours des convertis, des métissés, etc.

Pour ce qui est de l'argument égalitaire homme/femme dans ce contexte, il est également raciste. À moins que nous n'obligions tous les hommes de la fonction publique à porter des jupes, des boucles d'oreilles et du maquillage, ou encore à aucune femme de n'en porter. Certaines femmes considèrent que leurs cheveux font partie de leur nudité, contrairement à ceux des hommes. Leur exiger de dénuder leurs têtes en publique serait l'équivalent de forcer des femmes à se baigner en monokini dans les piscines et sur les plages du Québec, puisque les hommes le font. La nudité, la pudeur et leurs rapports à l'habillement sont complexes, influencées par des contextes sociaux, culturels, idéologiques, psychologiques, etc. Les hommes et les femmes s'habillent rarement de façon identique, quelque soit leur appartenance ethnique, culturelle ou ideologique. L'habillement est toujours l'expression individuelle de courants plus vastes. Il n'est jamais neutre.